lundi 16 octobre 2017

Bleus, blancs, cols

Dans mon article du 17 septembre 2013, je vous parlais du pourquoi de mon titre de blog. Et je vous disais aussi que je vous raconterai une autre anecdote sur cette personne qui voyait pour la première fois une assistante sociale homme !

Voici cette autre anecdote...

Toujours au même Centre Médico-Social, j'étais ce jour là avec les deux secrétaires et, bien sûr, nous nous trouvions au secrétariat en train de discuter. Quand le monsieur est revenu me voir. Il était gentil, vraiment, et nous avons vite sympathisé. Il n'aimait pas les papiers et préférait compter sur moi pour l'aider dans ses démarches administratives. C'est incroyable le nombre de personnes en difficulté avec l'écrit, notre belle langue française. J'accompagne très souvent des gens de tout âge et de toutes origines sur la création d'un CV, la rédaction d'un courrier - même très simple -, le remplissage d'un document administratif ; quant à "surfer" sur internet... alors là, je n'en parle même pas ! C'est un autre univers pour certains !

Heureusement, c'est ce genre d'activité que j'aime bien faire aussi car, pour moi, c'est assez aisé et cela parle vraiment aux usagers. Ils sont parfois impressionnés avec l'aisance dont je fais part dans ce domaine. Très souvent, ils me disent "je ne pourrai pas faire votre travail" ou "je ne sais pas comment vous faîtes pour vous y retrouver"... Alors, bien sûr, je leur réponds "chacun son métier ; vous croyez que je suis capable d'élaguer un arbre, de conduire un tractopelle, ou d'installer des canalisations ?". Mais ce qui renforce chez eux cette admiration pour l'écrit c'est, je pense, une sorte de croyance que l'accès à l'écrit ouvre la porte au savoir et donc au pouvoir. Or, même si quelque part il y a une sorte de vérité, il n'empêche qu'un monde dans lequel il n'y aurait que des intellos serait un monde invivable, voire mort. De même qu'un monde où personne ne pense mais où chacun fait serait un monde d'abrutissement total. Il faut trouver un juste milieu ; il faut que "les cols bleus" rejoignent "les cols blancs". Le savoir des uns doit être la nourriture des autres. Il y a aussi parfois du mépris de ces "petites gens" qui sont en bas de l'échelle sociale. Et je n'ai jamais compris et apprécié un tel mépris. Alors que le monde serait plus beau et plus vivable si chacun aidait l'autre et s'enrichissait de l'autre. Non ? A ce propos, il me vient une idée de lecture que je peux vous inviter à faire. C'est de lire (ou relire) "Les oiseaux du maître" de Christin. Une belle BD que j'ai bien appréciée et qui permet d'illustrer mes propos. Pour ceux qui ne connaissent pas, il s'agit des aventures de Valérian, l'agent spatio-temporel très souvent accompagné de la charmante Laureline...



Donc, pour revenir à mon mouton, que nous pourrions appeler Lucien, nous étions en train de discuter de tout et de rien avec les secrétaires quand mon "client" est entré et s'est présenté. Il n'avait pas vraiment l'air bien frais ; il ressemblait plus à un poisson séché qu'à un gardon ! En fait, il avait bourlingué la veille et sortait d'une soirée un peu trop arrosée. Ah, l'alcool ; encore un poison dont il faudra que je vous parle... Plus tard.

Nous étions donc les trois à l'accueillir et à venir à sa rencontre. Lucien nous expliquait qu'il fallait qu'il fasse une démarche administrative mais que cela lui passait au-dessus de tout ! Il devait refaire une carte d'identité et il devait obtenir un extrait d'acte de naissance. Jusque-là, rien de bien spécial pour moi. Je lui explique que par internet, si la commune de naissance est assez grande, elle doit certainement disposer d'un service internet état-civil et que nous pouvons faire cette démarche facilement, en deux clics et trois secondes.

Vous êtes né où Lucien, dis-je innocemment ?
Où que je suis né ?
Oui ; votre commune de naissance ?
Ah ! À Beuvry...

Nous n'avons pas pu nous retenir. Je revois mes deux secrétaires partir dans un grand éclat de rire très communicatif ! Lucien et moi, nous nous sommes mis aussi à rire ; c'était si drôle et si spontané ! L'accompagnement social réserve parfois de belles surprises !!! Ce sont vraiment des moments de la sorte qui fleurissent mon métier.




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